Écrire un livre : de l’idée à sa concrétisation

_ J’aimerais bien écrire un roman, mais je ne sais pas comment m’y prendre…
_ J’ai envie d’écrire sur mon expérience personnelle. Comment faire ?
_ J’ai plein d’idées mais je ne sais pas par quel bout commencer !

Cela vous rappelle quelqu’un ? 😉

D’après une consultation menée par le magazine Lire et la plateforme d’autoédition Librinova, 53 % des Français ont écrit ou ont envie d’écrire un livre : https://www.librinova.com/blog/2019/03/11/les-francais-et-lecriture-decouvrez-les-resultats-du-sondage-exclusif-lire-et-librinova/

Selon un sondage du Figaro, le nombre de rêveurs littéraires est de 32 % : https://www.lefigaro.fr/livres/2009/09/24/03005-20090924ARTFIG00516-un-francais-sur-trois-reve-d-ecrire-.php

Comment donc ?! Se pourrait-il que des millions d’idées se baladent dans le cerveau de nos concitoyens sans jamais trouver feuille ou ordinateur accueillant ? Quel gâchis ! Mais que se passe-t-il ?

Les obstacles au passage à l’acte

Écrire un livre, qu’il s’agisse d’un roman, d’un essai ou bien d’un témoignage, c’est indéniablement un gros projet. Un peu comme vouloir participer à un marathon quand on est un coureur du dimanche, voire…que l’on ne court pas du tout ! Alors bien sûr, devant l’ampleur de la tâche, on se trouve beaucoup d’excuses pour ne pas commencer. Le piège, c’est qu’elles sont la plupart du temps d’apparence très valable ! Examinons-en quelques unes :

_ « Je n’ai pas de talent ».

Vous n’êtes pas né avec une plume greffée au bout du bras ? Ce n’est pas grave : achetez-en une et faites-vous la main ! Reprenons l’exemple du quidam rêvant de marathon : comment faire s’il n’est pas doté d’une endurance naturelle, d’un corps élancé et d’un mental de ninja ? Il n’y a qu’une réponse valable : il faut s’entraîner. Pour l’écriture, c’est exactement la même chose : l’imagination et le style se travaillent. Plus on pratique, plus ils se développent. donc, si vous voulez devenir bon en écriture, eh bien écrivez ! C’est aussi simple que cela.

_ « Je n’ai pas le temps ».

Ah, les heures qui passent comme des secondes ! Les jours qui s’évaporent et nous laissent le soir hagards et désolés : « mais qu’ai-je donc fait de ma journée ? »… Il faut bien travailler pour « gagner sa vie », comme on dit (serait-ce que l’on perd quelque chose à chaque fois que l’on n’est pas à son poste ? Hmmm…c’est un autre sujet ! ) ; il faut faire à manger, s’occuper des enfants, voir sa famille, passer du temps avec ses amis, faire ses comptes, la vaisselle, la lessive, les carreaux… Et tandis que l’on gratte la tâche de gluten sur l’assiette avec le côté vert de l’éponge, on soupire, on attend un meilleur moment : « Quand mon évier sera vide…Quand mes enfants seront grands…Quand ma compagne me soutiendra moralement… » Quand…Quand…Quand…mais qu’en est-il de votre rêve d’écrire ? Il sera toujours relégué derrière ces « quand » hypothétiques. Alors quand ? Aujourd’hui, maintenant ! Vous avez bien cinq minutes, non ?

_ « Je n’ai pas d’idées ».

Vous vous imaginez très bien passer des heures derrière votre ordinateur à enchaîner les mots, les phrases, les paragraphes, l’esprit tout enfiévré.  Vous savez rédiger : vous avez déjà écrit quelques poèmes, noirci des pages d’écriture introspective…Le temps ? Vous le trouverez : vous êtes tellement motivé ! Seulement…il y a un hic. Un tout petit détail de rien du tout : vous ne savez absolument pas SUR QUOI écrire. Vous n’avez pas trouvé LE sujet qui vous entraînera dans une année de travail acharné et embarquera votre futur lecteur avec vous dans votre voyage littéraire. Pas de panique : vivez et notez. Notez la bouille triste de votre boulangère, la réponse décalée de votre collègue, la dispute rageuse de ce couple dans la rue…Votre entourage deviendra vos personnages. Votre environnement et les actualités seront l’argile que vous n’aurez plus qu’à façonner pour obtenir vos intrigues.

_ « J’ai trop d’idées ».

Il y a des gens qui ont le problème exactement inverse à celui précédemment cité : ils ont quarante idées par jour, des mots plein la tête, des envies en pagaille…Tellement…qu’ils s’y perdent et ne commencent rien ! Quand le plus grand désordre règne dans votre chambre, vous effectuez un rangement général et la pièce reprend forme humaine, n’est-ce pas ? C’est la même chose pour les idées : ne les laissez pas vous submerger, organisez-les. Triez-les par genre : les idées de personnages, les idées d’intrigues, les idées de lieux…Faites des fiches, des cartes mentales. Mettez en place un trieur. Nous y reviendrons un peu plus loin.

La clé numéro 1 : l’autodiscipline

Reprenons notre sédentaire ayant décider de courir un marathon : s’il se contente de s’inscrire à la course puis d’attendre le jour J sans rien faire, il y a fort à parier qu’il n’atteindra pas le 5e kilomètre…Dommage : il en reste 37,195 ! Pour éviter les déconvenues, il faut donc monter un plan d’entraînement progressif : notre apprenti-coureur peut commencer par deux kilomètres tous les deux jours, puis ajouter de la distance chaque semaine. Au fur et à mesure, l’effort lui semblera moindre. Il va développer son souffle, les muscles de ses jambes, sa volonté…

En écriture, c’est exactement la même chose : décidez de vous y consacrer un temps T à un moment M, en fonction de votre emploi du temps. Cela peut aller de tous les samedis de 9h à 12h à tous les soirs de 20h à 22h, ou encore durant votre pause méridienne… Définissez un créneau et respectez-le. Chaque session sera plus facile que la précédente car vous apprendrez à réguler votre souffle littéraire, à gonfler le muscle de votre imagination et à forger votre détermination.

Bernard Werber, par exemple, suit la même routine d’écriture depuis des années : il se met au travail de 8 heures à midi et demie, tous les jours. Voilà comment il parvient à sortir un roman par an ! Consultez donc cette instructive vidéo, il explique très bien pourquoi la régularité est la première clé vers votre objectif : https://www.youtube.com/watch?v=a0IZNlL3yIQ

La clé numéro 2 : le travail

Mais comment Alice ?! Après l’autodiscipline, voilà que tu vas nous parler de sueur sur le front et d’aisselles dégoulinantes ? Eh bien…oui ! Désolée, mais pour votre marathon, il faudra effectivement passer par de la transpiration, des moments où vous aurez l’impression de traîner, les joues en feu et le cœur à deux cents à l’heure. Mais c’est pour mieux voler à la fin, mon enfant !

Quand vous commencerez votre session d’écriture telle que vous l’aurez définie, par exemple, comme Bernard, à 8 heures du matin, vous ne serez pas toujours au top. Il vous arrivera d’avoir la tête dans le pâté, d’avoir vos deux mains immobiles au-dessus du clavier sans savoir quoi taper, de sentir un vide terrible dans votre esprit à sec, et même de n’avoir  aucune envie de commencer…C’est normal ! Une solution : forcez-vous. Allumez votre ordinateur ou sortez votre bloc de papier, commencez par relire ce que vous avez écrit la dernière fois. En général, cela suffit à « rallumer la flamme ». Si ce n’est pas le cas, écrivez tout de même. Les premières phrases sont souvent laborieuses : le moindre mot est vécu comme un accouchement difficile ; on galère pour savoir où placer une virgule, on bâtit un sujet-verbe-complément un peu banal…Tant pis ! Continuez. Au bout d’un moment, l’énergie sera là, et vous pourrez toujours reprendre votre début un peu maladroit.

Évidemment, il y a parfois dans l’activité d’écrivain des moments de grâce. De ceux qui nous laissent épuisés mais ravis, incapables de comprendre comment on a pu rédiger ce chapitre si émouvant, ce retournement de situation tellement inattendu, cette description sublime à pleurer : « Mais c’est moi qui viens d’écrire cela ? », se demandera-t-on sidéré… Une sensation particulièrement agréable ! Cela dit, la Muse ne soufflera pas tous les jours dans votre oreille et, pour un moment comme cela, vous en vivrez dix à fonctionner au ralenti, passant un quart d’heure à chercher un synonyme ou bien un adjectif qualificatif adéquat !

La clé numéro 3 : les cartes mentales

Un bon moyen de commencer un projet ! Que les idées fusent dans tous les sens (il vous faut donc les canaliser et les trier) ou au contraire que vous séchiez (il vous faudra explorer votre sujet dans les moindres recoins, faire des liens, des connexions…), la carte mentale est un outil intéressant dans les phases de planification d’un projet littéraire. Personnellement, je l’utilise presque systématiquement pour élaborer un synopsis de roman, la trame d’une nouvelle, une chronique ou même un article pour mon site. Par exemple, pour celui-ci, j’ai d’abord jeté sur une feuille de brouillon mes premières idées :

Oui, je sais : c’est moche et mal écrit. Si vous préférez élaborer une document joli, bien formaté, agréable à regarder, vous pouvez utiliser Publisher ou bien un logiciel de « Mind Mapping ». Pour ma part, j’aime bien que la carte se construise à la vitesse de ma pensée. Au centre de votre feuille ou de votre écran, inscrivez le « problème » à gérer :

_ « idées pour une romance entre deux octogénaires »
_ « une nouvelle d’anticipation sur le thème « un an plus tard » »
_ « une chronique sur les différentes méthodes pour éplucher un oignon sans pleurer » etc.

Autour, notez ce qui vous passe par la tête : idées de lieux, de personnages, d’événements…

La clé numéro 4 : le trieur

Pour organiser l’univers de votre roman, la trame de votre témoignage ou de votre essai, vous aurez besoin d’un outil pour classer, ranger, ordonner les différents éléments de votre livre.

Voici mon trieur spécial romans :

6 onglets :

_ CONCEPT : glissez-y tout ce qui définit votre roman : une phrase, le genre, le ton…

_ PERSONNAGES : idéalement, une fiche par personnage. Mais au tout début de votre projet, cela peut être simplement une carte mentale avec, au centre, « quels seront mes personnages ? et autour vos idées : tel personnage aura le physique de votre voisine, tel autre le caractère de votre neveu ; vous pourrez vouloir  « une octogénaire sportive aux cheveux roux » ou bien « un petit garçon chétif au QI inversement proportionnel à sa corpulence »…

_ LIEUX : là encore, l’idéal est d’établir une fiche par lieu, avec des photos, pour bien vous immerger dans l’univers de votre roman. Des descriptions jetées sur le papier avec de simples mots-clés, par exemple si l’organisation secrète de votre roman policier se réunit dans le parking désaffecté d’un ex-supermarché : « sale », « poussiéreux », « résonnance », « vaste », « de vieux panneaux publicitaires noircis et à moitié déchirés »…

_ ÉVÉNEMENTS : la liste de tout ce qu’il va se passer dans votre histoire. Vous pouvez consacrer une page par événement et y noter de simples mots-clés. Un conseil : n’écrivez qu’au recto de vos feuilles. en effet, lorsque l’on veut bâtir sa trame de roman, il est utile d’avoir toutes ses notes sous les yeux. N’hésitez pas à ajouter la scène dont vous venez de rêver cette nuit, ou bien celle qui vous est venue en faisant la queue à la caisse du supermarché…

_ STRUCTURE : il s’agit du squelette de votre livre : situation initiale, éléments perturbateurs, péripéties, climax, dénouement (c’est le schéma classique…Rien ne vous empêche d’innover, naturellement !). Décrivez en une phrase chacune de vos parties, puis développez-les en paragraphes. La structure est LE gros morceau, celui qui, s’il est complet et réussi, vous permettra de passer à la phase rédaction les mains dans les poches et les doigts dans le nez… (Euh… 🤔)  Pour la façonner pas à pas, vous pouvez suivre cette méthode dite « du flocon » : http://espacescomprises.com/wp-content/uploads/2013/02/La-m%C3%A9thode-dite-du-flocon-expliqu%C3%A9e-et-illustr%C3%A9e-v3.pdf

_ PRÉSENTATION / PROMOTION : un résumé de votre roman. Une liste de réponses à de potentielles questions (« Mais où êtes-vous allé dénicher cette idée ? », « De quel personnage vous sentez-vous le plus proche ? », « Vos personnages principaux sont deux octogénaires : que pensez-vous de la situation actuelle dans les EHPAD ? »…). Vous pouvez aussi y glisser une liste de maisons d’Éditions susceptibles d’être intéressées par votre œuvre, ainsi qu’une lettre de présentation alléchante de votre travail.

La clé numéro 5 : la motivation

Ça y est : vous avez une idée formidable ; vous êtes certain que les lecteurs vont se ruer sur votre livre ! Vous plongez sur votre clavier, le sourire aux lèvres et le cœur battant d’enthousiasme. Le premier jour, vous écrivez trois heures durant, sans même prendre le temps d’aller aux toilettes. Le deuxième jour, vous faites une pause café. Le troisième, vous conversez avec votre meilleure amie sur What’s App entre deux phrases, et le quatrième…Catastrophe ! Vous n’avez même pas envie de vous asseoir à votre bureau. En plus, il fait tellement beau ! Pourquoi vous priveriez-vous d’une promenade sous le soleil printanier ?

Bon…la motivation, ça s’entretient. Ça se cultive comme un plant de tomates : on en prend soin ; on l’arrose tous les jours. Trouvez ce qui fonctionne pour vous :

_ la visualisation : imaginez votre livre achevé, avec une belle couverture et votre nom en lettres dorées. Ne serez-vous pas fier quand votre éditeur vous en enverra un carton d’exemplaires gratuits, à distribuer à votre entourage admiratif ? 😋

_ l’engagement : parlez de votre projet autour de vous. Avec les réseaux sociaux, c’est tellement facile et rapide de partager un objectif ! J’entends déjà les anti-technologies se mettre à grogner… Ne vous en faites pas : vous pouvez tout aussi bien parler de votre idée de livre à vos amis autour d’un café, d’une bière ou d’un thé sucré, comme il vous plaira. L’essentiel est de VERBALISER votre envie d’écrire auprès de gens qui vous encourageront. Quand on a un coup de mou en cours d’écriture, on peut alors penser à notre amie Anne-Marie, à qui on a envoyé le début de notre roman et qui a très envie de découvrir la suite… 🙋‍♀️

_ la participation à des concours littéraires : pour briser la routine d’écriture durant un projet un long terme, rien ne vaut le passage au format court ! Écrivez donc un petit poème, ou bien participez à un concours de nouvelles. Cela vous sortira un peu la tête de l’eau… Vous replongerez dans votre roman un peu plus tard, l’esprit plus clair. 🤸‍♀️🤸‍♂️

_ le visionnage d’interviews d’écrivains : certains n’hésitent pas à partager leurs secrets d’écriture, à parler de ce qui les incite à continuer. Je pense à Bernard Werber (encore lui !) mais aussi à Laurent Gounelle, par exemple…

3,2,1…Écrivez votre chef-d’œuvre !